Teheran Air Show
Cette année, l’édition du Salon du Bourget, rebaptisé depuis quelques années « Paris Air Show », a eu droit à une concurrence inattendue, venue d’un pays peu habitué à de telles manifestations. C’est en effet du côté de l’Iran qu’il fallait porter son regard, si l’on voulait assister à des démonstrations en vol un peu plus percutantes que les sobres, mais néanmoins photogéniques allers et retours de Rafales ou d’A340 au-dessus des pistes de l’aéroport du Bourget.
James Boude
La faute à qui ? La faute aux Israéliens, bien sûr. Privés de stand d’exposition, sur une oukaze présidentielle, pour une demi-douzaine de sociétés venues présenter leurs technologies de pointe, nos amis Israéliens ont donc préféré la manière forte, en organisant un autre salon de l’Air et de l’Espace, une sorte de festival off – mais à balles réelles – au-dessus d’un espace de démonstration un peu plus étendu que celui de la petite bourgade de Saine Saint-Denis.
Il faut dire que les Israéliens n’étaient pas seuls, dans ce show aérien parallèle. Ils ont pu compter sur la participation active de leurs partenaires iraniens, qui tenaient à démontrer l’étendue de leur savoir-faire en matière de drones et de missiles balistiques, au détriment néanmoins de leur arsenal nucléaire qui n’a pas résisté à l’intensité du show. Outre l’Iran, les Etats-Unis étaient également entre-aperçus entre deux salves de missiles, largement représentés par les sociétés Boeing (absents du Bourget cette année) et Northrop, dont le B2 était probablement le clou du spectacle.
I ran, you ran, he ran…
Quelles conclusions tirer au terme de ce salon parallèle ? La fréquentation du Bourget n’a, semble-t-il, pas été impactée par l’absence de Rafael, IAI ou Elbit. D’aucuns prétendent d’ailleurs que l’activité commerciale se tenait en dehors des salons masqués par d’élégants mais un peu obscènes murs d’un air profondément ennuyeux. En revanche, du côté du Salon de Téhéran qui ouvrait semble-t-il ses portes pour la première année, le succès a été au rendez-vous, puisque toutes les chaînes de télévision, tous les médias, qu’ils soient pro-israéliens ou opposés à sa politique, son gouvernement ou ses habitants, ont largement repris et rediffusé les images et les informations en provenance de cette manifestation d’une ampleur jamais vue, en matière d’événement professionnel dans le secteur de la défense.
La question que se posent désormais les acteurs de ce marché, c’est sur une éventuelle seconde édition de ce show aérien grandeur nature. Si le Salon du Bourget – pardon, le Paris Air Show – se tient tous les deux ans, il n’est pas certain que les organisateurs israéliens, soutenus par d’éminents partenaires américains, et bien sûr, iraniens, aient envie de suivre un rythme aussi effréné. Question de gros sous, ça coûte bonbon de faire voler des centaines de jets tous les soirs ou de reconstruire des centrifugeuses en mauvais état…
On murmure cependant dans les milieux officiels que la qualité du spectacle était largement corrélée à la surprise de son organisation de dernière minute – y compris la participation des B2 américains, venus ponctuer cette semaine intense. Et bien évidemment, si le régime actuellement en place à Téhéran y était favorable, et montrait des signes d’intérêt, par exemple en reprenant un programme nucléaire militaire, une seconde édition se tiendrait très probablement, avec les mêmes acteurs, puisque les partenaires européens ont fait savoir qu’ils préféraient les kebabs de la Courneuve à ceux d’Ispahan et de ses environs.
Affaire à suivre, donc…
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Hervé Kabla, ancien patron d’agence de comm’, consultant très digital et cofondateur de la série des livres expliqués à mon boss.
Crédits photo : Yann Gourvennec
Absolument Excellent !
Merci 🙂
En France Le Bourget alterne avec l’EuroSatory tous les deux ans, le dernier dédier spécifiquement à l’armement, Le Bourget aux démonstrations plus pacifiques.
Je crois qu’il ne faut pas mélanger les choses même si l’on y retrouve souvent les mêmes exposants.
On essaie justement de ne pas mélanger les torchons avec les serviettes, mais la nuance n’est peut-être pas comprise de tous.
Effectivement, Eurosatory est dédié aux industries de défense et de sécurité, là où Le Bourget accueille des exposants de tout bord.
Ceci dit, je me souviens m’y être rendu plusieurs fois, et y avoir vu évoluer des joujoux pacifiques que ça, appelés Rafale, F-16, Hawker Harrier, et plein d’autres avions. La frontière entre torchons et serviettes, dans ce domaine, n’est pas toujours aussi claire que cela, un Airbus ou un Boeing à usage civil pouvant très bien connaître une évolution pour des usages militaires (transport, surveillance, brouillage, etc).
Airbus et Boeing sont des avioneurs, les Rafales et F-16 des aéronefs d’avioneurs différents, il y a là un amalgame qui ne facilite pas la compréhension. Laissons aux spécialistes de l’ aéronautique civile et de la Défense de gérer leur secteur respectif.