Le champ de personne

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On devrait toujours s’intéresser aux listes de lecture communiquées en début d’année, ou à l’approche des vacances, par les professeurs de français de nos enfants. Certaines peuvent en effet receler de petits trésors dont on ignorait l’existence, jusqu’à ce qu’on tombe dessus. Ce fut le cas pour moi, quand je me suis emparé du Le champ de personne. Je n’avais jamais entendu parler de ce livre, ni de son auteur, Daniel Picouly, pourtant médiatisé. Mais après avoir laissé ma plus jeune fille le lire pour l’école, je l’ai subtilisé, et l’ai littéralement dévoré.

Le champ de personne est un roman autobiographique, dans lequel son auteur, Daniel Picouly, raconte une journée un peu particulière, l’année de ses dix ans. Les événements anodins de cette journée lui remémorent d’autres événements marquants de sa vie, qui eux-mêmes, par un effet d’association un peu déstabilisant mais auquel on finit par s’habituer, font que le livre part un peu dans tous les sens.

Cela reste néanmoins fort agréable à lire, et le livre fut distingué par le Grand prix des lectrices de Elle, l’année de sa sortie. Il faut dire que les innombrables souvenirs qui remontent dans la mémoire du jeune garçon rappellent au lecteur une époque aujourd’hui disparue, celle de la fin de la quatrième république. Une époque où la grandeur de la France n’empêche pas une misère encore palpable, au sein de sa classe ouvrière.

Né en 1948, Daniel Picouly fête ses dix ans alors que le général de Gaulle veut instaurer une nouvelle constitution, que l’équipe de France de football brille en Suède, et que le rock’n roll fait chavirer la jeunesse.

Onzième d’une famille de treize enfants, le jeune garçon observe avec tendresse le monde qui change, au sein d’une famille qui ne manque pas de pittoresque. Regroupés dans une sorte de squat aménagé en région parisienne, et tenu de main de maître par la maman, ses frères et soeurs me rappellent, par certains aspects, les familles nombreuses des rapatriés d’Afrique du Nord. Évoluant dans une misère relative, les rejetons n’ont de cesse de trouver des combines pour améliorer le quotidien. Rien de franchement criminel, mais tous les moyens sont bons pour survivre et se faire plaisir, le maigre salaire de chaudronnier du paternel, employé chez Air France, suffisant à peine à faire tourner cette famille nombreuse.

C’est drôle, touchant, bourré d’anecdotes qui, des soldats Mokarex au Frigidaire, de la Caravelle à Marcel Cerdan, racontent une tranche de vie de l’histoire de France. Un « je me souviens » plus romanesque que le livre de Pérec, en quelque sorte.

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