La méthode des étudiants des classes prépa
Alors que les inscriptions sur Parcoursup viennent de démarrer et que de nombreux étudiants ont encore du mal à se projeter pour imaginer leur futur professionnel, à s’orienter vers une université ou une classe préparatoire aux grandes écoles (les fameuses CPGE), je voudrais évoquer un sujet sur lequel j’ai longtemps hésité à communiquer : la méthode enseignée aux étudiants des classes prépa.
Il faut dire que le sujet est délicat.
Même plus que délicat.
Le discours de la méthode
Allez discuter avec un ancien élève de prépa, ou avec un prof. Demandez leur ce qui fait la différence entre une formation en classes prépa et une autre – au hasard université ou études à l’étranger tous vous répondront à peu près la même chose : en prépa, on acquiert quelque chose qu’on n’acquiert nulle part ailleurs : une méthode de travail. La fameuse méthode des classes prépa.
Mais quelle est donc cette fameuse méthode ?
Ayant suivi, moi-même, cette formation il y a près de quarante ans, je ne me souviens absolument pas d’avoir suivi un quelconque cours de « méthode », ou de « méthodologie », pour reprendre un terme à la mode. Et après en avoir discuté avec quelques amis passés par le même cursus, je peux le confirmer : aucun n’a suivi un tel cours. Il n’existe pas de livre sur le sujet, et je ne connais pas de chercheur en sciences sociales qui se soit penché sur la question de la « méthode de travail » en classes prépa.
Mais alors, existe-t-elle vraiment?
Comment des milliers d’étudiants et de profs, ayant suivi une formation scientifique et rigoureuse, peuvent-ils prétendre l’existence d’une « méthode » pour laquelle je n’ai retrouvé aucune trace écrite, aucun texte, aucun parchemin, aucun embryon de formalisme ?
Serait-ce un mythe ?
Un conte pour enfants ?
Voire une légende, utilisée par les rescapé des classes prépas pour faire peur aux braves gens qui ont suivi des cursus plus modestes ? Non, je ne crois pas les anciens taupins suffisamment vicieux pour avoir monté un quelconque stratagème pour emberlificoter le restant de l’humanité.
Et il faut bien reconnaître qu’à l’issue de deux ou trois années de prépa, les étudiants ont acquis quelque chose qui les différencie de leurs congénères.
Mais alors de quoi s’agit-il?
Alerte spoil
À bien y réfléchir, je crois que c’est en fait une méthode très simple, qui se résume à quelques concepts :
- Couche-toi tôt.
- Pose ton cul sur ta chaise et travaille.
- Ne néglige aucune piste.
Pris séparément, ces préceptes ne suffisent en effet pas à former correctement un individu. Il existe des millions de personnes qui se couchent tôt, et ne sont pas des flèches pour autant. Il existe des millions de personne qui posent leur cul sur une chaise et bossent avec acharnement sans résultat. Et il existe des millions de personnes qui ne négligent aucune piste sans pour autant y parvenir.
Cependant, combinez ces trois approches, et vous vous rapprocherez du mode opératoire des étudiants des classes prépa. Et pas uniquement des classes prépas, mais de toute formation visant à former un « corps d’élite ». On se rend compte ainsi que ce mode opératoire n’est pas si différent des méthodes de travail d’autres types de formation, comme la Yeshiva.
La véritable difficulté consiste, en fait, à appliquer cette méthode, à respecter ces règles, sans y déroger, pendant suffisamment de temps. Et cela requiert quelque chose qui, hélas, s’acquiert plus difficilement.
De la volonté.
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Hervé Kabla, ancien patron d’agence de comm’, consultant très digital et cofondateur de la série des livres expliqués à mon boss.
Crédits photo : Yann Gourvennec
Je me souviens de la méthode proposée par un prof de physique (hypotaupe, Lakanal 71-72) :
« Gardez à l’esprit les points importants du cours et les énoncés de devoir, même pendant les heures de sport, ou quand vous êtes de loisir, au cinéma, en taverne, dans vos draps. »
Nous avions envie de lui demander si c »était valable en cas de rencontre amoureuse, mais son sens de l’humour se limitait à rire de ses propres blagues.
J’ai cependant retenu une autre de ses maximes, plus raisonnables : « Commencez par faire un raisonnement qualitatif ». Du gros bon sens, mais c’est souvent utile.