Bac 2020 : le Brevet d’Aptitude au Confinement ?

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C’est fou comme quelques jours de confinement permettent de bousculer les choses établies. Comme le remarquait avec ironie Anaïs il y a quelques jours sur Twitter, des milliards d’euros vont être déversés pour soutenir l’économie alors qu’il y a encore quelques mois, nous pensions tous que l’État français était gravement endettés. De la même manière, le télétravail, si difficile à mettre en place, est devenu la panacée pour des milliers d’entreprises qui peuvent se le permettre. La télémédecine était un pêché sévèrement puni, et devient du jour au lendemain le système de préférence pour maintenir les français non contaminés en bonne santé.

La transformation digitale à marche forcée

Vu sur LinkedIn.

Dernière victime en date de cette transformation sociétale à marche forcée, l’Éducation Nationale. Les réformes successives de l’enseignement, portées par chaque ministre de passage rue de Grenelle, n’avaient jamais envisagé le développement de l’enseignement à distance au-delà de la plateforme du CNED, et voici que des millions d’élèves découvrent les joies des sessions Zoom à plusieurs.

Le bac, notre bon vieux baccalauréat à la française, fait lui aussi partie des victimes de la vague de remises en causes. Mais là, il faut le dire, c’est un cas de force majeure. Comment organiser les épreuves écrites censées se dérouler mi-juin, alors qu’on ne connaît pas encore la date exacte de sortie du confinement ? Comment prétendre maintenir des épreuves orales dans des conditions sanitaires satisfaisantes pour les élèves comme pour les enseignants ?

Le contrôle continu va nous sauver

Résultat, Jean-Michel Blanquer l’a annoncé vendredi dernier, le passage au contrôle continu. On doit bien se marrer dans les chaumières. Tous ceux qui pensaient se la couler douce pendant l’année et mettre un coup d’accélérateur dans la dernière ligne droit vont en être pour leurs frais. Tous ceux qui ne pouvaient pas blairer leur prof de maths ou de philo, et pensaient bénéficier de l’indulgence d’un correcteur anonyme peuvent dire adieu à leurs rêves. Les notes de septembre à mi-mars, voilà ce qui servira à apprécier la valeur d’un élève de terminale, et lui accorder le Graal. Quant aux notes grappillées via des devoirs scannés avec un smartphone et envoyés au format PDF, je doute qu’elles aient la même valeur qu’un bon devoir sur table…

Inutile de vous faire un dessin : les recours vont pleuvoir d’ici septembre. Il faudra trancher, mais ce sera loin d’être facile. Vous vous imaginez la situation où un élève est recalé, et sait pertinemment qu’il retrouvera l’année suivante, comme enseignants, ceux-là mêmes à qui il reprochera une sanction trop sévère ? Et comment appréciera-t-on les taux de réussite par établissement ?

De mon point de vue, il n’y a pas à tergiverser. À situation de crise, décision de crise. Ce bac 2020, dont on reparlera dans quelques dizaines d’années comme nos anciens parlent aujourd’hui du bac 1968, il faut l’accorder au plus grand nombre, le donner, et basta. Et ne pas pénaliser inutilement des élèves qui auront connu le traumatisme d’un confinement passé dans l’angoisse de de voir passer une épreuve dont les règles ne sont pas fixées précisément. C’est d’autant plus nécessaire que le bac, et on en a déjà parlé ici, n’a plus la même valeur tragique qu’il y a trente ou quarante ans.

Vers une réforme durable ?

Est-ce que cela signifie que les prochains bacs devront se dérouler de la même manière ? La question mérite d’être posée. Plus qu’une sanction, le bac deviendrait un point de passage, un jalon, la dernière marche avant le passage vers l’enseignement supérieur, seul et véritable juge de paix. Mais pour cela, il faudra que les université soient capables de gérer un tel afflux de nouveaux étudiants. C’est également là que les milliards évoqués plus haut pourront servir.

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