À quoi sert la police ?

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Depuis que j’ai découvert Freakonomics il y a quelques années, je suis devenu un fan inconditionnel des interviews menées par Stephen Dubner, sur des sujets aussi variés que la pandémie, la prostitution, les ronds-points ou la carrière d’un sportif. Le seul point commun, entre tous ces domaines, c’est l’approche de Dubner : s’intéresser à la fac cachée de ceux-ci, en adoptant le point de vue d’un économiste. À chaque épisode, bien évidemment, Dubner et ses invités ne parlent pas que d’économie, et c’est tout ce qui fait le charme de ce podcast.

Ces dernières semaines, Dubner s’est particulièrement intéressé à plusieurs domaines dans lesquels les Etats-Unis se distinguent des autres nations : l’éducation, le rapport à la pauvreté, la santé… ainsi que la police. À quoi sert, finalement, la Police ? C’est la question qu’il se pose. Et il faut dire que dans un pays qui compte plus d’une arme à feu par habitant en moyenne, le rapport de force entre les citoyens et ceux d’entre eux susceptibles de faire respecter l’ordre et la loi ne peut pas ressembler à ce qui se fait aux quatre coins du monde. Sans parler des traces encore visibles de l’esclavage et d’une culture raciste dans les états du sud.

Bref, aux Etats-Unis, l’an passé, plus de 1000 personnes ont été tuées par les forces de l’ordre. Cela fait 34 morts par an pour 10 millions d’habitants. Une statistique glaçante, qui place les Etats-Unis en tête du palmarès des états démocratiques, avec un ratio trois fois plus élevé qu’au Canada et 10 fois plus qu’en France (en prenant, en plus, les statistiques récentes de Mediapart…).

Dans ce podcast passionnant, Dubner interview plusieurs personnes, dont un policier noire de la police New-Yorkaise, et le patron des forces de police de Londres. Il faut dire que les policiers londoniens sont réputés pour leur mesure et leur civilité, même s’ils savent faire preuve d’efficacité dans de nombreux domaines.

Dubner s’interroge sur la différence d’approche entre les deux pays. Et rappelle les principes édictés par Sir Robert Peel au 19e siècle, à la création de la Metropolitan Police. Ces 9 principes sont incroyables, et il faut les lire deux ou trois fois d’affilée pour bien comprendre leur portée.

  1. The basic mission for which the police exist is to prevent crime and disorder.
  2. The ability of the police to perform their duties is dependent upon public approval of police actions.
  3. Police must secure the willing cooperation of the public in voluntary observance of the law to be able to secure and maintain the respect of the public.
  4. The degree of cooperation of the public that can be secured diminishes proportionately to the necessity of the use of physical force.
  5. Police seek and preserve public favor not by catering to the public opinion but by constantly demonstrating absolute impartial service to the law.
  6. Police use physical force to the extent necessary to secure observance of the law or to restore order only when the exercise of persuasion, advice and warning is found to be insufficient.
  7. Police, at all times, should maintain a relationship with the public that gives reality to the historic tradition that the police are the public and the public are the police; the police being only members of the public who are paid to give full-time attention to duties which are incumbent on every citizen in the interests of community welfare and existence.
  8. Police should always direct their action strictly towards their functions and never appear to usurp the powers of the judiciary.
  9. The test of police efficiency is the absence of crime and disorder, not the visible evidence of police action in dealing with it.

Le 9ème principe est celui qui m’a le plus interloqué. Tout comme Dubner, d’ailleurs. Alors qu’on pourrait croire que pour juger de l’efficacité de forces de police, il faut suivre le nombre d’arrestations ou d’affaires criminelles résolues, c’est en adoptant l’approche inverse qu’on parvient à créer les conditions d’une coopération constructive entre les forces de l’ordre et leurs concitoyens : le bon indicateur, selon Sir Robert Peel, c’est l’absence de faits criminels.

Étonnant, on ?

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