Le tailleur de Relizane

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À un peu moins d’un an du soixantième anniversaire de l’indépendance de l’Algérie, quel souvenir du rapatriement des pieds-noirs la mémoire collective garde-t-elle ? Il a fallu plusieurs années pour que les événements d’Algérie soient qualifiés de guerre, il faudra sans doute pas mal de temps encore pour que ce rapatriement soit apprécié à sa juste valeur : une débâcle, vécue comme un traumatisme par des milliers de familles.

Parmi celles-ci, la famille Elkaim, ou Elkaïm, ou encore Elkayim, peu importe l’orthographe, qui varie au fil du temps et des individus. C’est son histoire que raconte Olivia Elkaim, petite-fille du personnage principal, Marcel, tailleur de Relizane, rejeton d’une famille juive installée depuis on ne sait quand.

Entre sa mère qui l’adore, sa femme toujours anxieuse, ses frères partagés sur le destin de l’Algérie, Marcel passe une petite vie tranquille, jusqu’à ce que les événements tournent peu à peu au tragique. Enlevé en pleine nuit, Marcel est libéré trois jours plus tard. C’est que Marcel, apprécié pour ses coupes toujours bien ajusté, peut tailler des costumes pour tout le monde, même les fellaghas… Marcel bénéficie donc d’une certaine protection, toute relative.

Pourtant cela ne suffira pas. Et fin juin 62, il fait embarquer sa famille dans une Caravelle qui les emportera dans le sud de la France, le temps pour lui de régler les dernières affaires, préparer le transfert des cadres. Arrivés en France, les Elkaim vont déchanter. Les pieds-noirs ne sont pas des héros, mais des nantis, jalousés du reste de la population française, qui leur reproche d’avoir fait suer le burnous. Il faudra dès lors tout reprendre à zéro : les années de galère se succèderont, le souvenir de l’Algérie restera.

Ce qui étrange, nous dit Olivia Elkaim, c’est que ce souvenir persistera au-delà de la génération de Marcel et de son épouse. Ses fils, sa petite-fille, traverseront tous une période de questionnement, une crise de la quarantaine qui les poussera à s’interroger sur ce passé algérien.

Le tailleur de Relizane est un livre attachant. Même si les conditions d’arrivée et d’installation en France furent différentes d’une famille à l’autre, on retrouve, au travers de ce récit de vie, certaines similitudes avec des situations vécues par nos parents et grands-parents, ne serait-ce que l’installation dans un HLM au bout de quelques années, et la réussite fulgurante des petits-enfants…

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