L’heure des prédateurs

Cet article vous a plu ? Pourquoi ne pas le partager ?

De Giuliano da Empoli, j’avais énormément apprécié le Mage du Kremlin, roman mêlant réalité et fiction pour nous raconter l’ascension du nouveau Tsar de toutes les Russies. C’est donc avec un intérêt prononcé que je me suis lancé hier dans la lecture de son dernier essai, L’heure des prédateurs, au titre évocateur, mais dont ni la jaquette, ni la quatrième de couverture ne donnent pourtant une idée précise du contenu. J’en suis sorti deux heures plus tard avec des sentiments mitigés.

De quoi traite ce nouveau livre ? Du monde dans lequel nous sommes entrés ces dernières années, un monde où les démocrates du centre se sont laissés déborder par deux sortes de monstres aux dents d’acier. Il y a d’une part ceux qu’il appelle les Borgia, ces autocrates qui ont pris le pouvoir en Chine, en Russie, dans de nombreux autres pays et même aux Etats-Unis. Et de l’autre, les technophiles qualifiés d’Asperger toutes les deux pages, qui préfèrent confier le destin de l’humanité à des algorithmes et des machines dans conscience, et dont le seul but et de maximiser une fonction d’utilité enfermée dans une boîte noire dont non ne sait pas très bien comment elle fonctionne.

Ce faisant, Giuliano da Empoli n’invente rien, il ne fait que corroborer les idées à la mode avec ce qu’il a pu constater dans son activité de conseiller politique. C’est parfois drôle, un peu effrayant – l’épisode consacré à MBS est hallucinant… – mais cela relève souvent plus de l’anecdote que de l’analyse de fond, quand bien même l’auteur fait preuve d’une large culture historique et politique – les références à Machiavel ne font de mal à personne, et je recommande la lecture du Prince à tous mes abonnés…

Ce livre Da Empoli me fait finalement penser par certains aspects à certains essais d’Alain Minc ou d’autres figures de la littérature contemporaine. Dotés d’une plume précise, ayant évolué dans des cercles politico-économiques, ces auteurs veulent nous faire goûter de leur pain quotidien, comme si on était friand de ces petites histoires entre réalité et fiction. Le problème avec ce type d’ouvrage, c’est qu’ils ressemblent finalement à une série d’articles issus d’un hebdomadaire à grand tirage, type l’Express ou le Point. Ici, en l’occurrence, on a droit à deux séries d’articles entremêlés, ceux sur les autocrates précités, et ceux sur la montée de l’IA. C’est parfois intéressant, mais rarement passionnant, tant cela part dans toutes les directions.

Bref, si ce livre se lit aisément, il ne laisse qu’une impression fugace. Celle d’un auteur qui en a encore sous le pied. Allez Giuliano, au boulot…

Cet article vous a plu ? Pourquoi ne pas le partager ?