J’accuse

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Qu’on apprécie l’individu ou pas, peu importe, Roman Polanski est et restera un grand cinéaste, capable de tirer des films de grande qualité des récits les plus insignifiants. Alors quand son scénario s’appuie sur l’histoire avec un grand H, comme pour Le Pianiste ou, ici, l’affaire Dreyfus, cela donne des films précis et sans bavure. Contrairement à Spielberg qui aime glisser quelques séquences où il joue avec nos émotions, Polanski reste sobre, et se contente de faire défiler le récit, tout en faisant une courte apparition dans le film (un caméo vers la 75ème minute).

En l’occurrence, nous avons affaire ici au point de vue du lieutenant-colonel Picquart. Cyrard, officier d’état-major, le hasard veut qu’il ait eu Alfreyd Dreyfus comme élève à l’école de guerre. N’éprouvant aucune sympathie pour le capitaine dégradé, il se retrouve à la tête de la section statistique, autrement dit le service de renseignement. C’est là qu’il va prendre conscience de la machination ourdie contre le polytechnicien, déporté à l’île du Diable.

Le film se déroule du début de l’année 1895 jusqu’à la réhabilitation de Dreyfus. Il décrit avec minutie les différentes étapes de l’affaire, du bordereau au « petit bleu », et permet de comprendre dans quel climat se déroulèrent ces événements, ainsi que le rôle des principaux protagonistes de l’affaire, Picquart en premier lieu, admirablement joué par Jean Dujardin, mais aussi le commandant Henry, les généraux Gonse et Mercier. Dreyfus, tout comme Zola, d’ailleurs, n’y tiennent qu’un rôle secondaire. Le titre, qui reprend l’article éponyme publié par Émile Zola dans l’Aurore, porte bien plus sur l’attitude d’un Picquart qui veut défendre l’honneur de l’armée française, que sur l’écrivain, mort quelques année avant la réhabilitation du capitaine.

Bref, ce film mérite d’être vu tant pour ses indéniables qualités esthétiques, que par le récit chronologique qu’il expose. Il fournira un méritoire rappel aux plus anciens, et servira de leçon d’histoire aux plus jeunes. Et pour celles et ceux que la dimension polytechnicienne de l’affaire intéresse, rappelons l’excellent article de Serge Delwasse et Olivier Herz, publié sur ce blog il y a quelques années.

Enfin, ce film sort alors qu’une n-ième accusation de viol sur mineur est proférée à l’intention de Roman Polanski. Il ne m’appartient pas ici de juger le cinéaste, à la justice de faire son travail. Je remarque seulement que la maîtresse de Picquart se nomme Pauline Monnier, alors que l’accusatrice de Polanski se nomme … Valentine Monnier. Étrange coïncidence?…

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