Ne pas chercher Médine à 14 heures…

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Fallait-il inviter le rappeur Médine à l’université d’été des verts, qui plus est, à une heure de grande écoute, alors que les juilletistes rentrent du boulot, crevés, dans les transports en communs, entre touristes colombiens et chinois, à la recherche d’un art de vivre pré-olympique, et les aoutiens, rentrés de leur randonnée ou de leur journée à la plage, prennent l’apéro, entre assiette crudité et picot bière bio ?

Essayons, dans l’article qui suit, de peser le pour et le contre.

Réussir son université d’été…

Depuis de nombreuses années, les partis politiques français ont pris l’habitude d’organiser des universités d’été, sorte de séminaires de rentrée ultra-médiatisés, censés rameuter les troupes, faire monter les nouvelles figures du parti, donner les grandes orientations ou ré-orientations du programme de l’année, ou lancer la campagne pour les prochaines élections.

Réussir son université d’été, c’est un véritable défi, pour les personnes en charges de ces événements. Il faut choisir la bonne date, ni trop tôt pour ne pas souffrir des grandes chaleurs ou de l’absence de pensée politique de nos compatriotes en vacances, ni trop tard pour ne pas se faire bouffer par les embouteillages sur les routes, la rentrée scolaire des enfants ou la morosité de la reprise. Il faut gérer une logistique dingue, accompagner les journalistes en quête de la moindre petite phrase.

Et surtout bien choisir ses invités. Il va de soi que les grandes figures du parti prendront la parole. Mais au-delà de ces figures de style attendues, il faut aussi soigneusement choisir quelques personnalité extérieures aux parti, on pourrait même dire « issues de la société civile », pour se donner une image d’ouverture. Cela peut vous paraître simple, mais cela peut aussi facilement virer au casse-tête. L’enfer est pavé de bonnes intentions…

EELV, les verts, les écolos quoi, je ne sais plus comment les appeler, ont donné ces derniers jours une parfaite illustration de ces remarques liminaires, en invitant un chanteur de 35 ans, dont pour ma part j’ignorais parfaitement l’existence, mais qui en quelques semaines a permis de lancer un coup de projecteur particulier sur cet événement de rentrée. Et a réussi à éclipser les autres sujets politiques du moment.

L’heure de Médine

Je veux bien entendu parler du rappeur Médine, invité à prendre la parole non pas à quatorze heures, comme le précise le titre de cet article, mais en fin de journée, pour un échange avec Marine Tondelier, dont le titre semble à lui tout seul déjà tout un programme : Explication de texte, la force de la culture face à la culture de la force.

Comme je l’ai dit plus haut, je ne connaissais pas Médine, ni ses textes. J’ai donc fait ma petite enquête sur Internet, suis allé compulser les textes de chanteur engagé, que dis-je engagé, enragé plutôt. Des textes pas plus intelligents ni stupides que la plupart des textes de rappeurs, la poésie en moins. J’aimais bien les rimes chaloupées de MC Solaar, je frémis moins aux rimes un peu entendues des textes de Médine.

Une nouvelle forme de lutte contre l’antisémitisme ? …

Les chansons de Médine font frémir la droite comme l’extrême-droite. De 11 Septembre à Don’t Laïk, elles expriment une certaine haine de l’occident et de ses valeurs dans son ensemble. Sans parler de Heureux comme un arabe en France, dont j’ai du mal à percevoir le message final. Mais ce qui a mis le feu au poudre, c’est un tweet, axé sur un jeu de mots ridicule, sur le nom d’une journaliste, Rachel Kahn, un calembour malsain. Médine a présenté ses excuses, mais voilà, cela ne passe pas. Car en passant d’un coup sous les projecteurs, c’est non seulement l’ensemble des textes de Médine qu’on se met à analyser, mais son tissu de relations, de Dieudonné à Pascal Boniface, un ensemble indigeste dont le centre gravité porte un nom : antisémitisme.

Le pompier pyromane. Il est pyromane. Mais surtout pompier. Et vice-versa.

Médine s’en défend, au titre de l’erreur de jugement. L’erreur de jugement, c’est comme l’erreur de jeunesse, sauf qu’on peut se la permettre à l’âge adulte. Des erreurs de jeunesse, on en commet tous. Comme celui qui passait sa vie à enchaîner les conquêtes féminines et doit le payer à l’époque du #MeToo. Ou le fumeur invétéré, qui non content d’avoir intoxiqué son entourage, va désormais se payer les affres d’un cancer.

L’erreur de jugement de Médine est moins pénalisante que les deux exemples précédents. Il en survivra, certes. Mais il est peu probable qu’on lui accordera longtemps le bénéfice du doute s’il continue sur cette voie…

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