Menace imminente

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Je ne suis pas un spectateur assidu des séries habituellement diffusées sur TF1, et ne suis pas non plus un fan absolu de Patrick Bruel (bien que j’aie assisté à deux de ses concerts, à près de trente ans d’intervalle). Mais avec Menace imminente, je me suis dit que je pouvais laisser mes préjugés de côté, et consacrer quelques heures à une série sur un sujet qui pourrait m’intéresser.

8-200

Produite par TF1 et plusieurs autres sociétés de production étrangères, cette série en six épisodes est librement d’inspiré d’un romain intitulé Unité 8-200, écrit par un ancien journaliste devenu rédacteur en chef du quotidien Haaretz. Je me souviens de ses chroniques, que je lisais il y a une trentaine d’années, alors que je suivais mon oulpan et m’étais abonné au supplément hebdomadaire de ce quotidien, des chroniques originales qu’il signait du pseudonyme « Captain Internet » : il était un des premiers journalistes à s’intéresser au Web, et proposait une analyse critique des sites qui fleurissaient à la belle époque des débuts de l’internet grand public.

Patrick Bruel campe donc Zeev Abadie, ancien de l' »Unité 8-200″, unité de Tsahal chargée du renseignement électromagnétique, allant des écoutes téléphoniques à la conception de virus informatiques. En voyage à Paris pour assister à une conférence sur les start-up – un équivalent de notre Viva technology – Abadie est rapidement par son ami et actuel patron de l’unité pour élucider une affaire de meurtre concomitante avec le détournement d’un logiciel israélien appelé Speed Monkey, capable de prendre la main sur le système de commande de tout véhicule récent, une menace réelle alors que le président américain et que le premier ministre israélien sont attendus à ce même événement. Bref, une série d’espionnage se déroulante en 72h, avec ce qu’il faut d’action et de suspense. Quoi de mieux ?

Peut mieux faire

Si la série promettait de passer un bon moment sur le papier, il était pourtant clair au bout du premier épisode qu’on n’atteindrait pas les sommets de Fauda ou Hatoufim. Ce n’est certes pas la faute à Bruel, qui cabotine juste ce qu’il faut, mais sait garder son sérieux lorsqu’il doit répondre au téléphone et s’exprimer dans un hébreu digne d’un olé hadach en deuxième année d’oulpan à Natanyah. Ni la faute aux autres acteurs, de bons acteurs de série francophone, qui font les grimaces qu’il faut quand ça fait mal, et savent esquisser un large sourire au moment d’un vrai câlin – la french touch….

Non, la raison de ma déception, c’est le scenario et sa mise en oeuvre. Comme nous le rappelle avec un à propos un vif échange entre la chef de la police et l’ambassadeur israélien au début du 5e épisode : « Le problème avec la France, c’est quelle rechigne souvent à mettre les moyens. Étant donné qu’avec Israel tout est compliqué, il faut accepter que cela prenne du temps« . Et c’est par la gestion du temps et des distances – mais on sait depuis Einstein que les deux sont liés – que cela pêche.

On a ainsi pu observer la jeune terroriste du premier épisode procéder à trois meurtres en une journée, à des endroits (Roissy, centre de Paris, préfecture de police) entre lesquels il faut compter une à deux heures de route en journée, tout en procédant à un vol au commissariat et à un kidnapping en fin de journée. Des terroristes aussi doués, ça ne court pas les rues.

La série perd donc en crédibilité d’entrée de jeu, et les malheureuses circonvolutions des épisodes suivants ne font rien pour effacer le malaise: partie avec près de 4,5 millions de téléspectateurs lors du premier épisode, elle s’achève en dépassant à peine les deux millions pour le 6e et dernier opus. Il paraît que c’est courant, mais cela m’a fortement étonné.

Peut vraiment mieux faire

Accessoirement, n’ayant pas pu voir certains épisodes le soir de leur diffusion, j’ai pu apprécier les limites de l’enregistrement d’une série sur TF1 et du visionnage a posteriroi, aussi bien sur la box qu’en replay. Une expérience extrêmement frustrante. Dans le premier cas (enregistrement planifié depuis une livebox), j’ai eu le sentiment de retourner des années en arrière, à l’époque des cassettes vidéo qui ne duraient pas assez pour enregistrer la totalité d’un film (je n’ai toujours pas vu la fin de Lolita…). Ici, les plages d’enregistrement n’étant pas respectées par TF1, je me suis retrouvé avec des épisodes auxquels il manquait plus de 5 minutes.

Qu’à cela ne tienne, je me suis donc rabattu sur le replay de TF1. Une expérience encore plus frustrante. Passons sur la publicité, qui inonde cette plateforme, au point qu’on a le sentiment que chaque pression d’un bouton de la télécommande déclenche la diffusion d’un spot de Jean-Paul Gauthier, de Renew ou de je ne sais quelle autre marque de lessive. Mais il n’y a pas que ça.

Imaginez-vous qu’une partie de la série étant diffusée en hébreu quand on la visionnait en version originale, j’ai eu la sordide idée d’utiliser l’interface du replay TF1 pour activer la v.o. et les sous-titres. Passons sur le fait qu’ici, il s’agissait de version anglaise (pour activer les voix en hébreu), non, ce qui m’a réellement fait bondir, c’est qu’on perdait le mode v.o. … après chaque coupure publicitaire. D’où la nécessité de réactiver la v.o., les sous-titres, puis revenir à l’épisode. Et une pression de trop vous faisant sortir de l’épisode, j’avais parfois droit à une coupure publicitaire de plus, avant de pouvoir relancer l’épisode – non pas là où je l’avais laissé, mais au tout début, devant activer le mode lecture rapide pour accéder au bon moment … et me payer une nouvelle coupure publicitaire… Mais comment peut-on concevoir une application replay aussi nulle ?

Ne boudons pas le plaisir

Bref, avec Danger Imminent, j’ai eu le plaisir de me payer du Bruel en hébreu et en prime time sur TF1. Avouons que cela n’arrive pas tous les jours, et qu’on serait nombreux à accepter de passer par les mêmes inconvénients publicitaires pour une saison 2.

On peut aussi se dire que cela n’a pas dû être si facile de tourner une série sur les relations politico-militaires entre la France et Israel ces derniers temps, avec tout ce qui a pu se passer entre le voyage de Macron appelant à une coalition internationale jusqu’à la demande émanant de l’Élysée d’interdire les sociétés d’armement israéliennes à Euro Satory.. Le tournage ayant débuté avant le 7 octobre, aucune scène n’a pu être réalisée en Israel, mais l’IA et d’autres décors naturels ont pu convenir. Accessoirement, le président français y est campé par un acteur qui fait beaucoup plus penser à Bruno Lemaire qu’à Emmanuel Macron.

Est-ce de bon augure ?

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