Le jour où l’Eurovision devint un champ de bataille…
D’habitude, le concours Eurovision de la chanson, tout simplement appelé l’Eurovision par ses fans, divise le monde en deux. D’un côté, il y a ceux qui le regardent d’année en année en s’attendant à passer une longue soirée musicale, agrémentée de costumes tarabiscotés, ponctuée de scores plus ou moins attendus. De l’autre, ceux qui boudent ce spectacle un peu plan-plan, au format extrêmement bien rodé, devenu au fil du temps un événement emblématique de la communautéLGBT+, et qui considèrent, peut-être à juste titre, que ces mélodies jouées en playback ne méritent pas toute l’attention qu’on leur accorde. Ces deux mondes, jusqu’à présent, s’ignoraient avec condescendance, le premier groupe d’individus considérant le second comme une univers de réacs frustrés, et le second considérant le premier comme la preuve vivante de la dégénérescence de l’occident.
Et ça tournait tant bien que mal, d’année en année, de capitale en capitale, au rythme des scandales vestimentaires et des votes un peu conventionnels, les pays baltes votant pour leurs voisins, les pays du sud votant pour les autres pays du sud, et nous, français, nous revendiquant d’avoir proposé la plus belle chanson, méprisée par des jurys et des publics ingrats.
Tout cela était bien symapthique.
Mais tout cela, c’était avant. Avant le 7 octobre, bien entendu.
October Rain
Car depuis l’attaque surprise du Hamas et la riposte israélienne, le concours Eurovision de la chanson est devenu un théâtre de guerre, un champ de bataille, où les partisans de l’éviction d’Israel du panel de pays représentés ont fait bien des dégâts.
La question de la participation d’Israel peut se poser d’un point de vue géographique. L’Europe s’arrêtant quelque part en Turquie, on voit mal ce qu’y feraient le Liban, la Syrie ou la Jordanie. Et donc Israel aussi. Mais en réalité, le concours Eurovision de la chanson ne concerne pas que des pays européens. L’Australie, l’Azerbaïdjan, y ont envoyé des représentants à plusieurs reprises. Et cette légère inflexion aux contours de l’Europe ne date pas d’hier. Ainsi, l’Afghanistan ou l’Iran pourraient parfaitement prétendre participer à cet événement musical, si tant est que ces pays seraient prêts à diffuser ce type de musique et d’artistes…
Si l’on considère donc l’argument géographique comme nul et non avenu, que reste-t-il aux adversaires d’une participation israélienne ? Tout simplement l’appel au boycott de tout ce qui touche à Israel, qu’il s’agisse de fruits et légumes, de produits manufacturés, d’universités ou de chansons. Tout au long des derniers mois de préparation, ces adversaires ont tenté de faire obstacle à cette participation. arguant que le titre ou les paroles de la chanson élue par le public israélien contrevenaient aux règles du concours. Ces demandes ont toutes été déboutées, seul le titre ayant évolué, pour passer de October rain, à Hurricane, pour sauver les rimes.
Cris et hurlements
Mais voilà, cela ne suffisait pas aux hordes de barbares qui ont déferlé sur Malmö. Résultat : nous avons assisté au spectacle le plus horrifique qui soit. À savoir une jeune chanteuse d’une vingtaine d’années, Eden Golan, sous haute surveillance policière tout au long de la semaine, et devant chanter sous les sifflets et les hurlements d’un public vociférant sa haine d’Israel. Car contrairement à ce qu’on a pu voir à la télévision, ce qui s’est passé était loin d’être une partie de plaisir…
Que croyez vous qu’il advint ? Alors que les jurys des différents pays participants sanctionnèrent la chanson israélienne, pourtant si proche de la chanson interprétée par la chanteuse suédoise qui avait remporté le concours l’année précédente, les votes du public la propulsèrent à la cinquième place, derrière le représentant français, et le trio de tête, peut-être plus conforme aux artistes habituellement récompensés pour leurs extravagances.
Mais peu importe le résultat.
Ce qui importe ici, c’est ce qui s’est passé dans cette salle de spectacle.
On a le droit de ne pas aimer Israel. Tout comme on a le droit de ne pas aimer l’Italie, la Suède ou la Bolivie. C’est humain, et l’humain est suffisamment tordu pour que tous les avis existent dans la nature.
Mais là, durant ce spectacle anodin, il ne s’agissait pas seulement de ne pas aimer Israel. Il s’agissait d’exprimer sa haine contre un peuple, une catégorie d’individus que je vous laisse aisément deviner, une haine animale, bestiale, qui ne laisse pas de doute sur le sort qui serait réservé aux israéliens si l’idée saugrenue d’état binational voyait le jour.
Si même les fans d’Eurovision se mettent à vociférer contre Israel et les juifs, cela n’augure décidément rien de bon…
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Hervé Kabla, ancien patron d’agence de comm’, consultant très digital et cofondateur de la série des livres expliqués à mon boss.
Crédits photo : Yann Gourvennec