La déchéance de nationalité est-elle le nouveau sexe des anges?

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Je me souviens qu’en classe de troisième, feu mon professeur d’histoire Mr Buffet nous avait expliqué que lors de la chute de Constantinople, les dignitaires Byzantins pris d’assaut discutaient du sexe des anges. Ce type de discussion, sans rapport avec la réalité du contexte et des risques présents, est passé dans la sagesse populaire sous l’appellation de « querelle byzantine ». Et je me demande si les débats autour de la déchéance de nationalité ne relèvent pas du même concept…

Siege_of_Constantinople ou déchéance de nationalité à l'ancienne?
Le siège de Constantinople (source: Wikipedia Commons)

Il faut dire que l’idée de lancer ce débat autour de la nationalité est une idée maîtresse du parti au pouvoir. Quelle magistrale leçon de politique intérieure: rien de tel qu’un débat stérile, autour d’un sujet sans intérêt, pour noyer le poisson et occuper l’opposition avec un os à ronger. La nationalité, sujet embêtant dans notre beau pays. Depuis qu’un parti détestable s’est emparé de l’adjectif qui lui est associé, aucun autre ne peut l’utiliser sans jouer avec le feu. Parler d’identité nationale, sous l’ère Sarkozy, c’était ouvrir un boulevard à la famille Le Pen. Parler de déchéance nationale, c’est occuper le terrain pour faire semblant de s’intéresser à quelque chose, mais à part cela, à quoi ça sert?

Car après tout, qu’est ce qu’on en a à foutre que le terroriste qui vient de se faire sauter ou d’assassiner 30 ou 50 personnes l’ait ou non, cette nationalité française. Vous imaginez un seul instant que lui même accorde une quelconque importance à sa nationalité au moment de commettre ses méfaits? Il s’en balance, comme de son premier étui de munition.

Voyons même au-delà. Supposons qu’on puisse déchoir de leur nationalité les terroristes bi-nationaux. Le faisons-nous après leurs méfaits? Mais alors cela ne sert à rien, surtout s’ils sont déjà refroidis. Le faisons-nous avant leurs méfaits, lors de leur départ dans un camp d’entraînement en Syrie ou ailleurs? Mais alors comment identifier les vrais terroristes des charlots qui s’offrent un peu de frayeur? Et sans nationalité française, sas papiers d’identité français, comment faisons-nous pour tracer leurs déplacements, véritable sujet de préoccupation? La déchéance de nationalité a-t-elle pour objectif de les pousser à se procurer de faux papiers, et à être encore plus difficile à tracer, aux frontières de Schengen?

Le débat autour de la déchéance de nationalité n’aurait jamais dû surgir. En occupant le cerveau de personnes compétentes – et j’estime qu’il y a encore quelques politiques compétents en France – on ne fait que réduire leur capacité de traitement des vrais problèmes de notre pays.

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