The Six Day War

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C’est dans la bibliothèque d’un de mes proches que je suis tombé sur ce livre inattendu : un livre consacré à la Guerre des Six jours, écrit par le fils (Randolph) et le petit-fils (Winston) de Winston Churchill ! Rédigé dans las semaines qui ont suivi le conflit probablement le plus court de l’histoire moderne, il relate à la fois la période qui précéda cette guerre, le déroulement des opérations, et les conséquences immédiates de la victoire israélienne sur les pays limitrophes.

Inutile de revenir sur le déroulé de la guerre. J’en ai déjà parlé dans un des premiers articles de ce blog, publié il y a presque vingt ans, à l’occasion du 40e anniversaire de cette guerre.

Ce qui est immédiatement intéressant dans le livre des deux Churchill, c’est qu’il relate avec fidélité les faits tels qu’ils étaient perçus durant les événements, et non avec le recul que procure un demi-siècle de conflits entre Israel et ses voisins. On peut palper, tant l’écriture des auteurs est limpide, l’ambiance de ces jours terribles, depuis le renvoi des forces de l’ONU puis le blocage du détroit de Tiran, jusqu’au cessez-le-feu mis en oeuvre au 6e jour de guerre.

Surtout, les auteurs expliquent la finesse du jeu israélien, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur. À l’intérieur, la population et le gouvernement israéliens étaient déjà convaincus qu’une guerre allait avoir lieu, les deux seuls questions étant à quelle date, et avec quel leader pour mener les opérations. Cela explique l’arrivé de Dayan au sein du gouvernement, alors que le premier ministre, Elvi Eshkol, était perçu plus comme un politique qu’un chef de guerre. Ce gouvernement de coalition ne durera pas, bien évidemment, et les tensions entre les partis reprendront le dessus après la victoire.

À l’extérieur, c’est un jeu de dupe que mène Israel, qui se refuse à adopter une attitude belliqueuse, de manière à ne pas être perçu, avant le déclenchement des hostilités, comme étant en état d’alerte, de manière à endormir la vigilance de l’armée égyptienne. Le succès de cette opération, au-delà des espoirs initiaux, est connu. Mais ce que je découvre en lisant ce livre, c’est qu’Israel a volontairement adopté un profil bas, ne communiquant pas sur ses victoires et laissant les armées arabes fanfaronner malgré le désastre, de manière à éviter la déclaration trop rapide d’un cessez-le-feu. L’objectif était de neutraliser les menaces que posaient l’armée égyptienne dans le Sinai, et l’armée syrienne sur la plateau du Golan. Pour cela, ne pouvant mener trois fronts à la fois, Tsahal a cherche à opérer rapidement au sud pour pouvoir engager plus tard ses forces au nord, avant que l’ONU – ou plutôt les deux grandes puissances – ne sonnent l’arrêt des combats.

Bref, ce livre, construit à partir d’échanges entre les auteurs et certains des belligérants – plutôt coté israélien, l’Égypte ayant décidé de censurer toute information sur le conflit – permet de se faire une idée plus précise de la réalité de cette guerre, entrée dans l’imaginaire comme une victoire facile, alors que la réalité était évidemment beaucoup plus contrastée. La violence des opérations terrestres entre israéliens et égyptiens ressort parfaitement. Et le bilan de ces 6 jours de conflit – près de 700 victimes du coté d’Israel, plusieurs milliers coté arabe – reflète bien l’intensité de cette guerre.

Au passage, j’y découvre certaines opérations étonnantes ou peu connues, comme cette colonne de chars israéliens dont deux tiers sont à sec, qui doit absolument prendre possession de la passe de Mitla, et dont le commandant décide de « treuiller » les chars sans carburant par ceux encore capables d’avancer, de manière à conserver sa puissance de feu. Ou encore cette autre colonne de chars israéliens, qui se retrouve subitement intégrée dans une colonne de chars égyptiens battant retraite sans que ces derniers comprennent qui sont leurs voisins : cela s’achève par une manoeuvre subtile pour se distinguer facilement les uns des autres (qu’auriez-vous fait si vous étiez à la place de cet officier ?).

Plus étonnant encore, le bombardement d’un navire de surveillance électronique américain par l’armée de l’air israélienne : le bâtiment avançait sans s’identifier, l’aviation israélienne a donc décidé d’ouvrir le feu, provoquant le décès de 35 marins, avant que le commandant du navire ne décide de hisser le pavillon américain… L’enjeu de la présence maritime américaine et britannique avait en effet son importance. Nasser, ne pouvant croire que son armée de l’air avait été anéantie par les seuls avions israéliens, avait communiqué dès le 5 juin sur une aide des forces aériennes américaines et britanniques, accordée aux israéliens, aide bien entendu totalement imaginaire, que même les Russes démentirent…

Bref, si vous voulez revivre ces heures terribles avec le regard d’un observateur pas toujours très neutre, mais véritablement au fait des choses militaires, offrez-vous ce livre, vous ne le regretterez pas.

Cerise sur le gâteau, le livre s’achève sur une analyse de la couverture média du conflit, qui fait immédiatement penser à la couverture média de la guerre qu’Israel mène à Gaza depuis deux ans. Soixante années après la Guerre des six jours, les choses n’ont finalement pas tellement changé…

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