Une bataille après l’autre
Dans la catégorie des films étranges, Une bataille après l’autre va probablement figurer en bonne place. D’abord par son titre, traduit mot à mot de la version originale One battle after another. De quelles batailles s’agit-il donc ? On observant l’affiche, je me suis dit qu’on allait retrouver le Leonardo Di Caprio de Body of lies, dans un bon film de guerre à l’américaine.
Mais non, il s’agit ici de tout autre chose. Le film raconte en effet le destin tragique d’un groupe antifasciste, la French 75, traqué puis démantelé grâce au travail obstiné d’un officier supérieur légèrement dérangé (remarquablement joué par un Sean Penn en grande forme), et dont l’artificier (Leonardo himself) se retrouve seul avec un enfant en bas âge, qu’il va devoir élever dans la clandestinité. Ce qui n’empêchera pas bien évidemment notre colonel déjanté de les retrouver et de tenter de « finir le travail », comme on dit de nos jours.
Un scénario alambiqué, donc. Et une mise en scène tout aussi délirante, accompagnée d’une musique alternant entre R&B et musique déstructurée.
Le résultat, c’est un film pas si mal ficelé, qui rappelle, par certaines séquences, le cinéma des frères Cohen (notamment Burn after reading), ou les films de Tarantino. On y assiste à l’une des poursuites en voiture les plus étonnantes de l’histoire du cinéma – attention, elle peut provoquer des malaises chez les personnes sensibles.
Mais en sortant de la salle, je n’ai pu m’empêcher de ressentir une certaine gêne, sur ce film armé de bonnes intentions, mais finalement très manichéen, qui tente de surfer sur la vague de la résistance contre une supposée dérive des Etats-Unis vers l’extrême-droite fasciste en mettant en scène un groupuscule de gentils antifas, qui ne font que faire sauter des barrages, libérer des clandestins ou braquer des banques.
Alors oui, c’est un film bien monté, bien réalisé, bien léché, aurait-on envie de dire. Mais certainement pas le film d’une génération, ni un témoin de son époque. Juste un pur produit des studios. En attendant le suivant.

Hervé Kabla, ancien patron d’agence de comm’, consultant très digital et cofondateur de la série des livres expliqués à mon boss.
Crédits photo : Yann Gourvennec