Longitude

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C’est en lisant le dernier livre de Gérard Berry consacré au temps que j’ai fait la découverte de Dava Sobel et de son étrange livre, intitulé Longitude. Ce livre assez étonnant retrace l’histoire a proprement parler incroyable d’un inventeur de génie, qui a consacré sa vie à un problème unique, le calcul de la longitude à lettre d’une horloge de précision.

Pour comprendre l’intérêt de ce livre, il faut se replonger dans l’époque à laquelle vécut John Harrison, héros de ce récit. Nous sommes à la fin du XVIIe siècle, une époque où le commerce maritime est un élément essentiel du développement économique des grands empires. L’Angleterre, mais aussi la France, l’Espagne ou le Portugal, comptent sur leur flotte pour importer des denrées rares et développer leur puissance.

Mais qui dit flotte dit océan, ce qui implique une multitude de risques, allant de la météo aux côtes aux abords effroyablement dangereux, ne serait-ce qu’au large de la Bretagne. Pour éviter ces dangers, il faut prendre le risque de s’écarter des routes connues, ce qui peut s’avérer encore plus aventureux… D’autant plus qu’à cette époque, les navigateurs ne disposaient pas encore de moyens précis pour calculer leur position. Si le concept de latitude et de longitude était bien connu, seule le calcul de la première pouvait s’effectuer avec une précision acceptable, en calculant l’élévation du soleil au-dessus de l’horizon à midi.

Le calcul de la longitude, lui s’avérait beaucoup plus compliqué. Pour résumer, deux écoles s’affrontaient : celle qui consistait à calculer la position d’un navire par rapport aux astres, la Lune ou les étoiles. Mais la position de ces astres évoluant au fil de l’année, les calculs s’avéraient effroyablement compliqués, et nécessitaient de connaître les positions de ces astres à des intervalles de temps réguliers. Bref, un travail d’astronome fastidieux, qui occupa entre autres Halley et Flamsteed, auxquels ont doit les premiers catalogues repertoriant les différents astres et leurs positions.

L’autre école s’appuyait sur un principe simple : si on emporte avec soi, à bord d’un navire une montre calée sur l’heure de Londres (ou de Paris ou de tout autre point), et si on compare l’heure affichée par cette montre alors qu’il est midi au point de l’océan où l’on se trouve, alors le décalage indique en réalité la longitude à laquelle on se situe. Une règle de trois toute simple permet de faire le calcul, un décalage d’une heure correspondant à 15 degrés de longitude, un décalage d’une minute à un quart de degré, et ainsi de suite.

le principe est simple, et fonctionne même lorsque les astres sont cachés par les intempéries, ce qui lui accorde un avantage certain sur l’approche astronomique. Mais hélas, les mécanismes d’horloges sont caprixieux, imprécis, surtout sur un navire qui bouge dans tous les sens. Et un décalage d’un quart de degré de longitude, cela peut représenter quelques dizaines de kilomètres. Bref, on n’est pas très avancé.

La résolution de ce problème – astronomie ou horlogerie – va opposer les partisans des deux approches pendant près d’un siècle. Et notre malheureux John Harrison va consacrer sa vie à mettre au point des horloges d’une précision incroyable, faites presque intégralement en bois, et quasiment indifférentes aux variations de température induites par de longs voyages en bateau.

Je n’en dis pas plus, et vous invite à découvrir vous aussi l’histoire de ce charpentier devenu horloger, et qui s’opposa aux esprits les plus brillants de son époque. On y découvre l’une des premières formes de financement de la R&D – l’ancêtre du CIR – et une invitation à une réflexion approfondie sur l’opposition entre l’approche scientifique et l’approche technique, pour résoudre les problèmes de notre époque…

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