1917

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Il m’a toujours semblé qu’au cinéma, le premier conflit mondial suscite rarement le même intérêt que le second. Il faut dire que la deuxième guerre mondiale, avec ses moments-clefs comme le débarquement de Normandie ou les grandes batailles du Pacifique, dispose de plus de sujets à évoquer sur grand écran que l’immense boucherie que fut la grande guerre. C’est pourquoi il est toujours intéressant de voir comment cette part d’histoire est évoquée au cinéma, et particulièrement quand de grands réalisateurs s’y prêtent.

Avec 1917, Sam Mendes livre une oeuvre pittoresque, qui relate non pas une grande bataille, mais un acte de bravoure dont on ne sait s’il s’inspire de faits réels, ou n’est qu’une adaptation imaginaire d’un récit de guerre, la dédicace à son grand-père n’étant là que pour ajouter à notre confusion. Deux soldats sont mandatés par un général dirigeant un corps de troupe britannique de rejoindre une unité située à une quinzaine de kilomètres, pour leur demander de renoncer à porter un assaut, car le retrait des forces allemandes derrière la ligne de front semble fort n’être qu’un piège destiné à anéantir cette unité et ses 1600 soldats. Deux heures durant, nous, spectateurs, suivons les aventures de ces deux soldats, qui prennent tous les risques pour traverser le no man’s land et réaliser leur mission.

Ce n’est donc pas par son scénario que 1917 se distingue du lot. Car le film, avec 8 nominations aux oscars, fait partie des favoris pour l’édition 2021 de cette cérémonie. Non, ce qui rend 1917 si particulier, c’est le parti pris incroyable de donner l’illusion au spectateur de deux très longs plans séquence. En réalité, il en a fallu plusieurs, dont les raccords sont à peine visibles – saurez-vous les identifier ? je n’ai pas réussi à le faire. Le spectateur a l’impression d’être immergé dans les scènes d’un réalisme incroyable, dont certaines rappellent quelques grands chefs d’oeuvre (de la Mort aux trousses à Saving private Ryan). C’est aussi la performance d’un acteur, George macKay, qui avec son air d’éternel ahuri, incarne un soldat britannique comme un autre, perdu dans ce conflit décidément trop grand pour lui.

Cela suffit-il à faire un grand film sur la première guerre mondiale ? Je ne le crois pas. Après deux heures de projection et d’un suspense assez soutenu, je reste sur ma faim. Il y a certes de grands moments cinématographiques et des images qui resteront collées sur vos rétines, comme les déambulations nocturnes dans les ruines du village d’Écoust (qui m’ont fait penser aux premières pages de Voyage au bout de la nuit), ou ces vues assez incroyables des tranchées alliées.

Mais par comparaison avec Les Sentiers de la gloire, ou l’impressionnant Johnny got his gun, 1917 reste un film essentiellement basé sur une prouesse technique, et sans véritable message à délivrer. C’est un peu les gentils contre les méchants, un point c’est tout. Je me souviendrai toute ma vie des heures qui ont suivi la projection de Johnny got his gun dans le grand amphithéâtre de l’X, et de la montée de stress qu’elle provoqua, quelques jours avant de partir effectuer mon service militaire. Je doute qu’une projection de 1917 provoque autre chose qu’un phénoménal ennui, d’ici quelques années, une fois l’engouement passé.

Update du 10/02/2020: il semble que le jury des Oscars a confirmé mon avis. trois prix, dont celui des meilleurs effets spéciaux.

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