Otage – 491 jours aux mains du Hamas

Cet article vous a plu ? Pourquoi ne pas le partager ?

Depuis l’attaque du 7 octobre, de nombreux livres sont sortis, pour raconter ce qui est arrivé ce jour-là, pour témoigner de la montée de l’antisémitisme ou pour raconter l’état d’isolement dans lequel se retrouvent les membres de la communauté juive au sens large, un peu partout sur la planète. Avec Otage, voici le premier livre publié par un témoin de premier ordre de ce qui s’est passé pendant ces deux dernières années : celui d’un otage revenu vivant de cet enfer.

On pourrait croire qu’Eli Sharabi est un otage comme un autre, un anonyme parmi les 251 capturés par le Hamas, dont les familles ont attendu la libération si longtemps, ou du moins un signe de vie permettant de garder l’espoir de retrouvailles déchirantes. Mais ce n’est tout à fait le cas.

Âgé d’une cinquantaine d’années lors de sa capture, Sharabi est un des cadres du kibboutz Be’eri, où il s’est installé plus de vingt ans auparavant. Il est doté d’une solide éducation, parle plusieurs langues dont l’arabe, il a enseigné l’économie, et c’est surtout un observateur doté d’une grande curiosité, qui sait d’adresser aux plus jeunes qu’il va rencontrer en captivité, otages ou geôliers. Bref, il fait preuve de nombreuses qualités à la fois d’observation et de résilience, qui donnent à son témoignage la même texture, si l’on peut dire, que celui de Primo Levi dans Si c’est un homme, toutes proportions gardées.

Le livre s’ouvre sur la matinée du 7 octobre, racontée sobrement, sans s’appesantir dans une traumatologie excessive ou sur l’analyse des circonstances qui ont pu mener à l’attaque. Ce tout simplement pas n’est pas un livre politique. Dès les premiers pages, Sharabi raconte comment il est arraché à sa famille, dont il restera sans nouvelles jusqu’à sa libération. Conduit en quelques minutes à Gaza, il doit être protégé par ses ravisseurs pour ne pas être lynché sur place. Les yeux bandés, les mains attachées, il est conduit chez un père de famille gazaoui qui va l’héberger dans des conditions sordides mais encore acceptables par rapport à ce qu’il ne va pas tarder à connaître.

Car quelques jours plus tard, après que les bombardements israéliens se furent intensifiés, Sharabi et son compagnon d’infortune, un ouvrier thaï perdu au milieu de cet enfer, sont transférés vers l’un des nombreux tunnels qui sillonnent la bande de Gaza. Initialement aménagés pour protéger les terroristes du Hamas en cas d’attaque israélienne, pour se déplacer à l’abri des drones d’observation ou pour servir d’entrepôts et y dissimuler des armes.

Sharabi va passer près d’un an et demi dans ces tunnels, qui hébergent prisonniers et ravisseurs, dans une chaleur intense. Il va y croiser une demi douzaine d’autres captifs, dont certains ne reviendront pas. Tout au long de ces pages, Sharabi décrit d’abord les conditions de vie, ou plutôt de survie. Sous-alimentés, maintenus enchaînés par des terroristes parfois à peine plus âgé que leurs victimes, ils vivent au jour le jour, au gré de leurs interactions entre eux ou avec leurs ravisseurs, au gré de leurs humeurs, également.

Une telle proximité pendant si longtemps crée des liens. Certes pas des liens d’amitiés, Sharabi sait très bien à quoi s’en tenir. Mais il plonge profondément au coeur de la nature humaine, distinguant les individus fondamentalement mauvais de ceux capables d’un soupçon d’humanité de temps à autre, et la plupart du temps quand ses acolytes ne sont pas dans les parages. Ces terroristes sont de jeunes gens, terrifiés de partir combattre quand les effectifs se font plus parsemés au sein du mouvement terroriste. D’autres se considèrent comme de braves pères de famille, comme dans la première maison où il fut détenu dans les premiers temps.

Tous pourtant témoignent d’une haine fondamentale de leurs voisins, les israéliens, et des juifs en général, qu’ils espèrent bien voir renvoyés en Europe… Une haine alimentée par la désinformation diffusée par le Hamas et par ses partenaires de propagande, Al Jazeera en premier lieu.

Il faut ce lire ce livre, pour comprendre plus précisément le gap psychologique entre ces otages, qu’il s’agisse de ces jeunes israéliens capturés au festival Nova, et leurs ravisseurs. Et le faire lire à ceux qui croient que le Hamas est une bande de rigolos, de résistants ou de gens fréquentables. Pour comprendre que ce qu’Israel est parti faire à Gaza n’est pas ce que les médias présentent, mais une double opération de sauvetage : sauver ses orages, certes, mais également sauver les gazaouis d’une domination néfaste.

Eli Sharabi a côtoyé le mal, dans sa forme la plus actuellement banale, celle des supporters du Hamas, de terroristes à temps partiel, déguisés en civil au sein de leurs familles, et terroristes sans pitié dès qu’ils mettent le nez dehors.

Cet article vous a plu ? Pourquoi ne pas le partager ?