Sauver les enfants, Sauver mon fils
Les enfants sont fragiles et doivent être protégés. Au-delà de ce lieu commun, il est quelque chose de plus profond, même si la tautologie paraît évidente : nos enfants sont notre avenir. C’est toutefois fondamental : une société qui protège ses enfants assure son avenir.
Depuis une quarantaine d’années, de gros progrès ont été faits, en particulier en France, qu’il s’agisse de la ratification de la convention internationale des droits de l’enfant de 1989, qui crée la notion d’intérêt supérieur de l’enfant, à l’interdiction des châtiments corporels (loi dite « anti-fessée ») de 2019.
C’est ainsi qu’un énorme travail de libération de la parole tout d’abord, en particulier sous l’impulsion de la CIIVISE, avec la coopération de l’Épiscopat, de répression ensuite, grâce à une politique pénale volontariste et ferme, de prévention enfin, a été réalisé concernant les agressions sexuelles et les viols de mineurs.
Il est toutefois une maltraitance qui a peu, voire pas du tout, été abordée : celle de l’aliénation parentale. Cette notion est même critiquée, voire contestée, par certains. De quoi s’agit-il ? Pour faire simple, un parent dresse son ou ses enfants contre l’autre parent, autre parent dont il est en général séparé. L’enfant se laisse persuader que le parent que je qualifierai de « cible » est mauvais, qu’il ne l’aime pas, qu’il le maltraite, voire le violente, voire pire… Et, malheureusement, ça marche ! Et cela a des conséquences dévastatrices non seulement sur l’enfant, mais également sur l’adulte qu’il deviendra. Ces conséquences peuvent même être du même ordre que celles du viol : de longues années, 30 dans mon cas, pour ne serait-ce que se rendre compte de ce qu’on a subi, une dizaine de plus pour encomprendre la gravité, quelques une de plus pour accepter, apaiser sa colère, et atteindre (une certaine) sérénité. C’est long, c’est douloureux.
Comme pour le viol, le pattern se reproduit : ce que ma mère – puisque c’est d’elle qu’il s’agit – m’a fait subir, elle l’a également faite subir à mes frères, de 7 et 18 ans plus jeunes que moi, frères dont je ne suis pas certain qu’ils s’en soient remis aujourd’hui. Puis, elle a tenté de le faire à mes propres enfants. Sans bien comprendre ce qui se passait, j’ai eu le réflexe de les protéger, et je lui ai interdit de les voir. J’ai été condamné pour cela. Mais j’ai protégé mes enfants…
Alors, qui conteste le concept ? principalement les militant(e)s féministes. Il y a une raison à cela : si 90% des violences physiques sont le fait des hommes, une grande partie des aliénations parentales sont générées par les femmes. C’est normal. Théorie des avantages comparatifs de Ricardo. Chacun utilise les armes avec lesquelles il est le plus à l’aise – je reconnais que je résume un peu vite Ricardo, mais ce n’est pas un billet d’économiste. Chez les hommes il s’agit des poings, voire du phallus, chez les femmes il s’agit donc du cerveau.
Ceci étant posé, vient une seconde question : « pourquoi? » – question que m’a posée un juge récemment. La cour d’appel de Paris écrivait dans un arrêt de 2022, « il est certain que toute mère, normalement soucieuse de l’éducation de son enfant… ». Où vont se loger les préjugés archaïques… Dans ces conditions, pourquoi une mère ferait-elle cela ? L’incapacité à trouver un mobile – la maltraitance étant un délit, on parle bien de mobile – ou, du moins, à présenter un mobile crédible, étant un argument sérieux en réfutation. J’en vois trois, et ils ne sont pas mutuellement exclusifs :Tout d’abord, le plus immédiat, la vengeance : j’étais amoureuse, j’ai été bafouée, je me venge en faisant mon possible pour priver le père de ce qu’il aime. En second lieu, tout aussi immédiat, la pathologie psychiatrique – n’étant pas psychiatre, je me contenterai d’une citation de Gabriel Dromard, dans Essai sur la Sincérité « Un [être humain] se sent dans l’erreur, mais comme il se plaît dans cette situation, il se donne le change à lui-même et se persuade très positivement que cette erreur est une vérité ». Et même s’ils se rendent compte qu’ils étaient dans l’erreur, longtemps après, ils se trouvent des justifications. Ma mère, par exemple, a récemment écrit « je regrette énormément de l’avoir totalement coupé de son géniteur [sic], même pour le protéger« . Dans mon cas, tous ceux qui ont laissé faire, voire ont été complices, l’ont fait en toute bonne foi, qu’il s’agît de la police, des juges, de mes grands parents… persuadés qu’ils étaient par celle qui s’était elle-même persuadée ! Enfin, ce que j’appellerais le syndrome de la mère juive : l’enfant est sa chose. Elle seule sait ce qui est bon pour lui. Tant qu’elle vit avec le père, l’enfant reste sous contrôle. Lorsqu’elle est séparée du père, elle ne peut supporter de perdre le contrôle. Il faut alors gommer le père. A tous les admirateurs de Romain Gary, à tous les lecteurs de La Promesse de l’Aube, je pose la question : comment expliquer que Gary, qui était en bonne santé, qui avait l’argent, la gloire, la réussite, bref, qui avait tout pour être heureux, se fût suicidé ?
J’ai commencé cette tribune en expliquant que je m’en étais remis, que j’avais compris, que cette histoire était à présent derrière moi. Alors, pourquoi faire mon coming-out ? Parce que ce que j’ai subi, »on » le fait subir, à présent à mon fils qui a 10 ans. Depuis près de 8 ans, lorsque j’ai quitté sa mère, j’ai successivement été irresponsable, pervers sexuel, kidnappeur et maintenant violent. La Justice, la Police, l’Éducation nationale, les services sociaux, les experts, en toute bonne foi, n’imaginant pas qu’une mère pût agir autrement que dans le strict intérêt de son enfant ont, peu à peu, privé ce dernier de l’amour que son père peut lui donner. Je ne l’ai pas vu depuis 18 mois, il ne veut plus me voir, désormais persuadé qu’il est que je suis un homme violent qui le frappait, qui ne l’aime pas, qui ne s’en occupait pas, ou, quand il s’en occupait, qui s’en occupait mal. Il est même allé jusqu’à transformer les souvenirs de moments de bonheur ensemble en souvenirs pénibles.
Je n’ai pas de doute, un jour il comprendra. Mais ce sera malheureusement trop tard. Le temps de la Justice n’est pas celui de l’enfance. Cette dernière finira, à n’en pas douter, par reconnaître que toutes les accusations portées sont fantaisistes. Mais ce sera trop tard. Il sera adulte. Et il aura été violé, irrémédiablement abîmé…Si vous ne voulez pas écouter le père que je suis, écoutez la victime que j’étais, et que je suis toujours.
Et je dis : ne faites pas à mon fils ce que »vous » m’avez fait. Rendez lui son père. Sauvez-le.

A heavy weather skipper
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