De l’utilité des primaires

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Je me suis souvent demandé, ces derniers temps, quelle était la véritable utilité des primaires, et si nous n’étions pas en train de payer, et pour longtemps, cette pâle copie du processus électoral américain. J’appartiens en effet à une génération qui a connu ces élections où de supposés grands hommes – Pompidou, Mitterrand, Chirac – remportaient des élections présidentielles en s’appuyant sur un parti qu’ils dominaient, outrageusement. Mais depuis 2007 et les primaires de la gauche, nous assistons à un véritable délitement du leadership politique.

Le problème des primaires, c’est qu’elles font supporter le processus de désignation du candidat d’un parti, non pas sur la structure du parti, mais sur un large substrat d’électeurs, sympathisants ou non de ce même parti. Jadis, avant les primaires, un candidat était issu d’un processus de sélection qui n’admettait aucune rébellion: il fallait suivre ou être rejeté. Mitterrand, Chirac, ont dominé leur partie d’une manière outrancière. L’opposition à cette domination, la tentation de se dresser contre cette figure, se payait tôt ou tard: Rocard, Balladur en ont fait les frais.

Mais avec les primaires, le candidat n’est plus ce tueur né, rodé à l’élimination des opposants internes à son parti, et suivi par ses troupes : le candidat issu des primaires est le fruit d’un consensus mou . Fillon est surgi de nulle part durant la dernière semaine de campagne des primaires de la droite, Hamon va représenter un parti divisé comme jamais.

Ce mode de sélection a un impact sur la suite des opérations. N’étant pas ce lion qui règne sans partage, le candidat issu de primaires n’a pas la même légitimité, la même capacité à imposer ses vues. Il n’a pas fait le ménage en amont, il va devoir composer. Sa légitimation ne vient pas de son parti, mais d’électeurs dont on sait bien qu’ils sont volages … Et ce candidat peut se retrouver à la merci de la moindre contestation, du moindre manque de support.

Fillon va s’effondrer, c’est quasiment certain. La droite n’a plus le temps ni les moyens d’organiser une nouvelle primaire, ni même de revenir à l’ancien mode de désignation, la tambouille interne d’où émergeait parfois le président suivant. Le seul candidat que peuvent désormais présenter Les Républicains, c’est celui qui acceptera d’aller au casse-pipe à la place des autres .

Le prochain président élu en 2017, à n’en pas douter, sera issu d’un des trois partis où l’on ne trouve pas ce processus mollement démocratique appelé « primaires ». Ce sera le chef incontesté de son partie, de sa troupe de supporters. C’est peut-être la seule bonne nouvelle qui émerge de ces temps difficiles pour la classe politique française.

Et en 2022, il sera temps d’oublier ce triste processus de sélection. Trop de démocratie finira par tuer a démocratie.

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